道地 Daodi – Terroirs, traditions & réseaux économiques

Parmi les plantes utilisées dans la Pharmacopée Chinoise, certaines sont réputée meilleures lorsqu’elles proviennent d’une région de production particulière, à la manière d’un terroir d’Appellation Géographique Protégée. Autrefois simple tradition non encadrée, la production de ces herbes Daodi est aujourd’hui réglementée et nourrit la recherche scientifique sur les plantes médicinales chinoises.

Synthèse

Définition traditionnelle

Le terme « 道地 Dàodì » désigne une région avec :

  • des conditions naturelles et un environnement écologique spécifiques (qualité du sol, altitude, régime climatique, etc.),
  • une tradition de méthodes culturales, de modes de récolte et de préparation particulières (séchage, fumage, transformation, stockage, etc.).

Les herbes cultivées et préparées dans leur Daodi sont :
– réputées de meilleures qualité ;
– porteuses d’un ensemble de caractéristiques leur conférant une efficacité clinique stable reconnue depuis longue date (traditionnellement observée par l’efficacité clinique et aujourd’hui confirmé par l’analyse moléculaire).

Parmi les 584 herbes communément en usage dans la Pharmacopée Chinoise (2015), 284 d’entre elles présentent des caractéristiques « Daodi » définies, ce qui représentent environ 80% du volume total consommé.

Notes :

  • En pratique, il est nécessaire pour les producteurs des régions Daodi d’utiliser des semences de plantes médicinales provenant de cette même région et de respecter les modes de culture et de transformation traditionnels de cette région, sous peine de perdre l’appellation « herbe Daodi« .
  • Une coopérative regroupe le plus souvent ces producteurs au sein d’une organisation coordonnatrice qui assure à la fois la transmission des savoirs, la répartition des semences et le contrôle de la qualité.
  • Le terme anglais traduit est parfois “geo-authentic herbal products” ou “genuine origin”.

Définition légale

L’administration chinoise a promulgué [? en 2014-2015 → à préciser] une définition standard du terme « 道地药材 dàodì yàocái » :

« Les herbes médicinales Daodi sont produites dans une région spécifique et ont été utilisées sur le long-terme en médecine chinoise. Elles sont plus réputées que d’autres herbes médicinales produites dans d’autres régions, leur qualité et leur efficacité sont supérieures et stables. »

Conséquences :

  • Aujourd’hui, la notion d’herbes Daodi semble servir de référence pour la production de produits médicinaux d’Herboristerie Traditionnelle Chinoise.
  • Afin de pouvoir assurer une production cultivée de qualité, de nombreux programmes de recherche ont été lancés pour observer et recenser les conditions Daodi préférentielles pour chacune des plantes médicinales. (voir ci-dessous)
  • Ce travail a fait l’objet d’une première synthèse bibliographique en 2016 sur 39 plantes (traduite en anglais par Thomas Avery Garran) et une deuxième publication devait voir le jour en 2022 [? pas de nouvelles].
  • Depuis cette période, la notion d’herbes Daodi et de région Daodi influence grandement l’axe stratégique de la recherche scientifique chinoise (Cf : article connexe à paraître).

[ ? depuis ?2019 un “institut de qualité des plantes médicinale” aurait été créé → rechercher]

Extraits d’études scientifiques :

Les études cités ci-dessous ont été traduite d'après les textes originaux. Nous en incluons des passages complets pour leur caractère représentatif, qui  résisteraient mal à une reformulation.

The formation of daodi medicinal materials (Zhao et al., 2012)

Il s'agit ici d'un compte rendu très complet que nous traduisons dans son ensemble, tant il apparaît comme un pivot fondateur pour l'ensemble de la recherche à une date où le concept de Daodi n'était pas encore été légalisé, et où la recherche sur le sujet cherchait encore un angle stratégique.
1. Introduction

Le terme « matière médicinale Daodi » fait référence à un concept largement reconnu dans l’industrie médicinale chinoise depuis des siècles. Il a également été connu sous le nom d’herbe médicinale authentique et supérieure, herbe médicinale authentique, matière médicinale authentique, matière médicinale géo-authentique, géo-herbe ou top-géo-herbe (Hu, 1989, Huang et al., 2007, Organisation mondiale de la santé, 2007, Xiao et al.., 2007, Huang et al., 2010, Zhao et al., 2012), la translittération pinyin Daodi est progressivement devenue un terme technique spécialisé accepté, au même titre que yin, yang et qi. La « matière médicinale Daodi » est un terme usuel synonyme de produit médicinal de haute qualité. Sa notoriété n’est pas sans rappeler l’expression honorifique « lao zhong yi » (littéralement « vieux docteur en médecine chinoise »), qui est utilisée pour décrire les praticiens seniors célèbres de la médecine chinoise (Zhao, 2011) [il n’avait pas encore de définition légale à la date de cette étude].

La « matière médicinale Daodi » est définie comme une « matière médicinale produite et assemblée dans des régions géographiques spécifiques bénéficiant de conditions naturelles et d’un environnement écologique déterminés, en accordant une attention particulière aux techniques de culture, à la récolte et à la transformation. Ces facteurs conduisent à une qualité et à des effets cliniques supérieurs à ceux de la même origine botanique produite dans d’autres régions, ce qui explique qu’elle soit largement reconnue et jouisse depuis longtemps d’une bonne réputation ». Parmi les 580 matières médicinales chinoises couramment utilisées [décrites dans la Pharmacopée Chinoise], environ 200 sont reconnues comme ayant les caractéristiques MMD. La consommation de ces 280 MMD représente 80 % de la consommation totale de substances médicinales en Chine (Pan, 2011).

Le mot « 道地 dàodì » est composé de deux caractères :

  • le caractère « 道 dào«  était une ancienne unité de mesure chinoise pour la division des districts administratifs. Sous la dynastie Tang (618-907 de l’ère chrétienne), la nation était divisée en 10 « dao » correspondant à 10 types de paysages [synthétisant végétation, climat, géogolie, etc. ; voir article connexe dédié -à venir] dans les années Zhenguan, puis en 15 dao dans les années Kaiyuan. Conceptuellement similaire au système actuel d’organisation des provinces, l’influence profonde de ces noms est encore perceptible dans les noms chinois actuels donnés aux régions du Japon et de la péninsule coréenne, comme Hokkaido (beihaidao).
  • Le caractère «  di » désigne au sens large la « terre », le « terrain » ou le « sol », comme dans la géographie, les régions, la topographie et les formes de relief.
2. La pratique clinique de la médecine chinoise est à la base de la formation de la matière médicinale daodi.

La médecine chinoise a accumulé une vaste expérience clinique concernant l’utilisation des substances médicinales sur une longue période, et des variétés médicinales de qualité supérieure ont émergé de cette tradition. On peut comprendre qu’il n’y aurait pas de concept de « matière médicinale daodi 地药材 dàodì yàocái » sans l’expérience clinique de la médecine chinoise.

La littérature historique contient des informations claires sur les substances médicinales Daodi. En Chine, les ouvrages qui décrivent les sources et les applications des substances médicinales sont généralement titrés « Bencao » (materia medica). Les textes sur les matières médicinales des dynasties passées décrivent principalement trois aspects d’une substance médicinale : les caractéristiques de cette matière médicinale (source, forme, etc.), ses propriétés médicinales (saveurs, tempéraments, etc.) et les principes médicinaux qui orientent son utilisation (posologie, modes de préparation, etc.). En ce qui concerne la description des matières médicinales, la définition des régions de production revêt une importance grandissante au cours de l’histoire de la littérature médicinale :

  • Shen nong ben cao jing (Materia medica du divin laboureur) : ce texte datant de la dynastie des Han de l’Est (25-220 de l’ère chrétienne) a été le premier texte à aborder l’importance des régions de production, en particulier dans la phrase « chaque matière médicinale est soumise à des lois concernant sa région de production, son authenticité et sa fraîcheur« . Bien qu’à l’époque il n’ait consigné que des descriptions géographiques simples telles que « pousse dans les vallées montagneuses, les vallées fluviales ou les marais » [notions qui perdurent encore aujourd’hui dans les descriptions de plantes médicinales], de nombreux noms médicinaux sont riches en connotations de régions de production.
    Exemples : 巴豆 Bā Dòu Semen Crotonis (issue de Croton tiglium L.), 巴戟天 Bā Jǐ Tiān Radix Morindae (issu de Gynochthodes officinalis (F.C.How) Razafim. & B.Bremer [syn. : Morinda officinalis F.C.How]), 蜀椒 Shǔjiāo Pericarpium Zanthoxyli (issu de Zanthoxylum bungeanum Maxim.), 秦皮 Qín Pí Cortex Fraxini (issu de Fraxinus chinensis Roxb.), 秦艽 Qín Jiāo Radix Gentianae Macrophyllae (issu de Gentiana macrophylla Pallas) et 吴茱萸 Wú Zhū Yú Fructus Evodiae (issu de Tetradium ruticarpum (A. Juss.) T. G. Hartley [syn. : Evodia ruticarpa (A.Juss.) Hook.f. & Thomson]), etc. où « Ba« , « Shu« , « Wu » et « Qin » sont les noms de régions qui étaient utilisés, avant et après l’ancienne dynastie des Zhou occidentaux (vers 1100-771 av. J.-C.), pour reflèter l’origine géographique des substances médicinales auxquelles ils étaient accolés.
  • Ben cao jing ji zhu (Collection of Commentaries on the Classic of the Materia Medica) écrit au cours de la période des dynasties du Nord et du Sud (420-589 de l’ère chrétienne) : le texte commence à répertorier les régions de production spécifiques des substances médicinales, et indique clairement que « les lieux d’où proviennent toutes les substances médicinales ont des limites spécifiques » et commence à utiliser des termes tels que « le meilleur » (zui jia) et « surpasse » (wei sheng) pour décrire les corrélations entre l’apparence, la région de production et la qualité.
    Par exemple : la racine de réglisse Glycyrrhiza uralensis Fisch. ex DC (source de 甘草 Gān Cǎo Radix Glycyrrhizae), il est indiqué dans la description de cette herbe que les spécimens ayant « un cortex rouge, une fracture irrégulière et une texture ferme… sont les meilleurs« .
  • Xin xiu ben cao (Nouvelle révision de la Materia Medica), materia medica commandée par le gouvernement de la dynastie Tang : « si la matière médicinale n’est pas produite dans son environnement d’origine, l’effet sera différent« .
  • Qian jin fang (Formules valant mille pièces d’or), texte de la dynastie Tang écrit par Sun Simiao, considéré « roi de la médecine », a commencé à utiliser le « 道 dào« , unité de mesure pour la division des districts administratifs, pour désigner les régions de production ; ce texte défini ainsi le concept original de ce qui sera plus tard connu sous le nom de « 道地 dàodì« . Dans le premier volume, la section « utilisation des remèdes » indique : « Les médecins de l’Antiquité dépendaient des médicaments produits dans les zones de production appropriées. Par conséquent, s’ils traitaient dix patients, ils obtenaient des résultats pour neuf d’entre eux. Bien que les médecins contemporains comprennent le pouls et les prescriptions, ils ne connaissent pas les régions de production, les périodes de récolte et la qualité des substances médicinales. Par conséquent, ils n’obtiennent des résultats que dans cinq ou six cas sur dix« . Cela suggère que l’on ne peut obtenir d’excellents résultats thérapeutiques qu’en utilisant des MMD.
  • Ben cao yan yi (Extension de la Materia Medica) : ce texte de la dynastie Song (960-1279 C.E.) contient une déclaration claire : « Toutes les substances médicinales doivent être choisies dans des régions de production appropriées » (Association of Chinese Culture Research, 1999).
  • Ben cao pin hui jing yao (Essentials of Materia Medica Distinctions) : ce texte commandé par le gouvernement de la dynastie Ming (1368-1644 de l’ère chrétienne) recense 1809 plantes médicinales et comporte 1371 illustrations. L’entrée « 道地 dàodì » a été formellement répertoriée sous la rubrique « terre » (di) pour 268 plantes, spécifiant ainsi leurs régions de production Daodi. Sous cette rubrique, des termes spécialisés exprimant diverses nuances ont été utilisés pour décrire la supériorité des plantes médicinales et de leurs régions de production (Cao, 2004) (Fig. 1). Ce texte a donc commencé à documenter les matières médicinales Daodi à l’aide d’une terminologie professionnelle, et a posé une référence historique quand à son échelle et ses spécificités de base (espèces, variétés, processus, etc.).
  • Plus tard, l’expression « bonnes matières médicinales Daodi » est apparue dans le célèbre chef-d’œuvre opératique « Le pavillon de la pivoine : Exploration de la médecine » de Tang Xianzu (Tang, 2002). L’expression « matières médicinales daodi » s’est ainsi largement répandue dans la culture populaire chinoise.
Fig. 1. Dessin représentatif de l’espèce Rehmannia glutinosa (Gaertn.) DC (source de 地黄 Dì Huáng Radix Rehmanniae), dans l’ouvrage Ben cao pin hui jing yao (Essentials of Materia Medica Distinctions) commandé par le gouvernement de la dynastie Ming (A) et photographie de la plante (B).

Aujourd’hui, la MMD est reconnue comme l’une des parties les plus précieuses de la materia medica ancienne (Hu, 1995). Dans la première monographie moderne sur les MMD, 159 MMD (dont 131 substances botaniques, 20 zoologiques et 8 minérales) sont classées en 8 catégories selon les régions de production : Chuan (Sichuan), Guang (Guangdong/Guangxi), Yun (Yunnan), Gui (Guizhou), Nan (Chine du Sud), Bei (Chine du Nord), Zhe (Zhejiang et alentours) et Huai (Henan et alentours) (Hu, 1989) [voir aussi étude suivante ci-dessous]. Des centres de collecte et de distribution de MMD ont également été créés dans différentes régions de Chine (Zhao et al., 1990).

3. La ressource génétique supérieure est le facteur interne de la formation du matériel médicinal daodi.

La Chine présente un vaste territoire parcouru par de nombreux reliefs avec des chaînes de montagnes complexes [Cf article de synthèse à venir] et des conditions climatiques variées. Cette diversité d’écosystèmes naturels, qui génère une abondance de variabilité génétique botanique et zoologique, parfois très localisée avec un fort taux d’endémisme, est le facteur principal de la formation des matières médicinales Daodi (Zhao et al., 2012), [paradoxalement à partir de plante cosmopolites, à forte adaptabilité (Lei et al. 2018)].

Les caractéristiques particulières d’une plante sont déterminées [à la fois par la mémoire contenue dans les facteurs d’hérédité (génotype) et par l’environnement qui exprime différentiellement certains aspects de cette réserve d’information et provoque certaines évoluions (phénotype)]. Les anciens mentionnaient parfois les différences entre les substances médicinales produites au nord et au sud. Au-delà du concept de région de culture, ces différences correspondent le plus à des espèces végétales différentes (taxonomie).
Par exemple : les Ignames, racines de plantes du genre Dioscoreae sont réparties entre variétés comestibles et médicinales depuis la dynastie Ming. Le rhizome frais des Ignames comestibles vendu sur les marchés aux légumes est grand et plat. Il ne ressemble pas au produit médicinal que l’on trouve dans les herboristeries.
Le rhizome de Dioscorea oppositifolia L. (Syn. : Dioscorea opposita Thunb.*) 對葉薯蕷 Duì yè shǔyù, plante vivace à profonds tubercules, originaire du Myanmar et du sous-continent indien (Inde, Sri Lanka, Bangladesh), qui n’est pas référencé dans la Flore de Chine, est la source de 山药 Shān Yào Rhizoma Dioscoreae oppositae. Les matières médicinales sont cultivées dans une région relativement septentrionale, connues sous le nom de « huai shan yao« . Celles produites sur les sites de plantation des comtés de Wuzhi et de Wen, dans la province du Henan, sont considérées comme étant de qualité supérieure, en particulier le cultivar ‘Tiegun‘ spécifique connu sur le marché sous le nom de « tie gun shan yao« .
L’utilisation de rhizomes d’Ignames dans l’alimentation est répandu dans les provinces méridionales. Leur origine botanique est complexe, impliquant plusieurs espèces comme : Dioscorea polystachya Turcz. (Syn. : Dioscorea batatas Decaisne, Dioscorea opposita Thunb. Dioscorea opposita auct.*) 薯蓣 Shu yu (Igname de Chine), Dioscorea japonica Thunberg 日本薯蓣 Rìběn shǔyù, Dioscorea alata L. 参薯 Shēn shǔ., Dioscorea hamiltonii Hook.f. [syn. : Dioscorea persimilis Prain et Burk.] et Dioscorea fordii Prain et Burkill 山薯 Shān shǔ (Lou et Qin, 1995, Xu et Xu, 1997).
[Note : il s’agit ici d’un exemple difficile à saisir, qui a été édité de sa forme originale, car il existe une grande confusion taxonomique concernant les Ignames en Chine. Dioscorea polystachya Turcz. a longtemps été injustement nommé Dioscorea opposita (auct.*) dans les ouvrages, et ainsi confondu avec Dioscorea oppositifolia L., lui même auparavent nommé Dioscorea opposita par le botaniste Thunberg.
* L’épithète auctorum, abrégé auct. (comme dans Dioscorea opposita auct.) inscrit à la place du nom du premier inventeur indique qu’un nom, en botanique et en zoologie, est utilisé dans le sens des auteurs ultérieurs, et non dans le sens établi par l’auteur original. Cf. règles de nomenclature botanique.]

La médecine chinoise utilisée depuis très longtemps de nombreuse plantes médicinales. Les produits médicinaux chinois se caractérisent par des origines diverses et complexes. Dans la Pharmacopée Chinoise (2010), 616 substances médicinales sont répertoriées et plus de 25 % d’entre elles (157) proviennent de deux sources ou plus. Bien que ces substances médicinales portent des noms chinois similaires, elles proviennent d’espèces végétales différentes.

Par exemples :

4. Les conditions géographiques favorables sont le facteur externe de la formation de la matière médicinale daodi.

Il est bien connu que les facteurs environnementaux tels que la topographie, le sol, le climat, l’humidité et la lumière influencent directement les métabolites secondaires (dont beaucoup sont des constituants bioactifs) des plantes. Les anciens observateurs ont reconnu que des environnements différents ne produisent pas seulement des changements d’apparence, mais aussi des différences de nature médicinale.
Par exemple : Conioselinum anthriscoides var. Chuanxiong (H.Boissieu) Pimenov & Kljuykov [syn. : Ligusticum chuanxiong Hort., Ligusticum sinense cv. Chuanxiong S.H.Qiu, Y.Q.Zeng, K.Y.Pan, Y.C.Tang & J.M.Xu.] (source de 川芎 Chuān Xiōng Rhizoma Ligustici Chuanxiong), est un cultivar [diploïde, qui ne fleurissent jamais et ne produisent jamais de graines, à tubercule épais, rhizomes lourds et aromatiques] de la Livèche de Chine Conioselinum anthriscoides (H.Boissieu) Pimenov & Kljuykov [syn. : Ligusticum sinense Oliv.] (source de 藁本 Gǎo Běn Rhizoma Ligustici). Il comporte l’épithète « 川 Chuān » dans son nom car sa MMD est principalement cultivée dans des régions du Sichuan telles que Dujiangyan et Pengzhou, qui ont la plus grande production et la plus longue histoire d’utilisation médicinale. Cependant, des variations génétiques similaires sont apparues dans un autre cultivar [triploïde] Ligusticum sinense Hort. cv. Fuxiong S. M. Fang & H. D. Zhang, produisant une herbe connue sous le nom de 抚芎 Fǔ xiōng, principalement cultivé dans la province de Jiangxi, qui reste également longtemps sans fleurir et ne germe que rarement. Bien que Fǔ Xiōng ait également des rhizomes larges et charnus, ceux-ci contiennent moins d’huile volatile et de ligustrazine que le Chuān Xiōng cultivé dans le Sichuan (Fang et Zhang, 1984). [note : cela ne précice pas lequel du cultivar ou de l’environnement est le facteur limitant à cette moindre concentration…]

Le temps a apporté de grands changements à l’environnement de la Chine au cours des deux derniers millénaires. La sélection naturelle [et la domestication humaine] ont entraîné un certain nombre d’évolutions en termes de variétés, de régions de culture et de ressources naturelles pour certaines MMD.
Par exemple :

  • Panax Notoginseng (Burk.) F.H.Chen (source de 三七 Sān Qī Radix Notoginseng), le centre de production actuel du Notoginseng radix (san qi) se trouve dans la région de Wenshan au Yunnan, alors que la région de Tianzhou dans la province de Guangxi était à l’origine son centre de production préférentiel.
  • Wolfiporia hoelen (Fr.) Y.C. Dai & V. Papp [Syn : Pachyma hoelen Fr.] (source de 茯苓 Fú Líng Cortex Pachymae), provenait historiquement des la province du Yunnan, d’où son nom « Yun Ling » ; aujourd’hui, la matière médicinale dominante provient de la région de Luotian dans le Hubei et est appelée « jiu zi he fu ling » (Sun et al., 2009).
  • Panax ginseng C. A. Mey (source de 人参 Rén Shēn Radix Ginseng) est l’un des exemples les plus classiques. Avant la dynastie des Song, le Ginseng était présent dans une vaste région comprenant le Shanxi, le Hebei et les provinces du nord-est de la Chine. Les illustrations existantes du « lu zhou ren shen » prouvent que des plants de Ginseng poussaient autrefois dans la région de Luzhou (aujourd’hui connue sous le nom de région de Changzhi, dans le Shanxi). Le texte des dynasties du Nord et du Sud (420-589 de l’ère chrétienne) intitulé Ming yi bie lu (Miscellaneous Records of Famous Physicians) indique que le 人参 Rén Shēn produit dans la région de Shangdang, au Shanxi, était de grande qualité. Toutefois, en raison de la surexploitation et des changements environnementaux, le 人参 Rén Shēn de la province de Shanxi a été épuisé précocément. À l’époque de la dynastie Qing, la région de production Daodi attribuée à 人参 Rén Shēn s’était déjà déplacée vers le nord-est de la Chine. D’autre part, au cours des années du « Grand Bond en avant » (1958-1959), lorsque les habitants de la Chine continentale ont tenté de cultiver le Ginseng sur l’île de Hainan, dans le sud de la Chine, les racines étaient grandes mais presque totalement dépourvues de composants actifs, ce qui les rendait pratiquement inutilisables au-delà de l’apparence.
[De plus, certaines espèces ont été tellement cultivées qu’elles sont quasiment devenues rares dans la nature, voire même les souches naturelles ont quasiment disparues.
Par exemple :

5. Les progrès des techniques de culture favorisent le développement de la matière médicinale daodi.

La Chine est une grande nation agraire. L’expérience accumulée par les Chinois de l’Antiquité en matière de culture a été appliquée très tôt à la culture des plantes médicinales. Pourquoi a-t-il fallu attendre la dynastie Ming pour que les MMD progressent en termes d’échelle et de portée ?

Si on regarde au cours de l’Histoire, pendant les dynasties Song du Sud et Yuan (1127-1368 de l’ère chrétienne), la Chine centrale était perpétuellement ravagée par la guerre. Suite à cette période, le gouvernement de la dynastie Ming a mis en œuvre des politiques d’immigration qui ont considérablement accéléré le développement de l’agriculture en Chine centrale. Les réalisations de cette époque ont été résumées par des ouvrages tels que Nong zheng quan shu (Texte complet de politique agricole) de Xu Guangqi et l’ouvrage de science et de technologie Tian gong kai wu (Exploitation des œuvres de la nature) de Song Yingxing. Ces progrès de l’agriculture ont permis d’accumuler de l’expérience en matière de culture pendant de nombreuses années, et les techniques de culture des plantes médicinales ont peu à peu mûri. Les espèces botaniques utilisées comme sources de matières médicinales daodi ont alors commencé à être [cultivées méthodiquement et sélectionnées pour être devenir principalement des variétés domestiquées, peu à peu différentes des populations sauvages alentour].
Par exemple : 牛膝 Niú Xī Radix Achyranthis bidentatae, 地黄 Dì Huáng Radix Rehmanniae, 山药 Shān Yào Rhizoma Dioscoreae oppositae et 菊花 Jú Huā Flos Chrysanthemi, connus sous le nom de « quatre herbes célèbres du Henan », sont des chefs-d’œuvre représentatifs de cette époque.

  • Les techniques de culture de Rehmannia glutinosa (Gaertn.) DC. (source de 地黄 Dì Huáng Radix Rehmanniae) sont décrites dès la dynastie Tang dans le texte médical Qian jin fang (Formules valant mille pièces d’or). À partir de la dynastie Ming, il était généralement admis que 地黄 Dì Huáng produit à Huaiqingfu (province actuelle du Henan) était d’une qualité particulièrement élevée. Li Shizhen, de la dynastie Ming, avait noté que « les anciens cultivaient [Rehmannia glutinosa] à partir de graines, tandis que les contemporains le cultivent à partir de racines ». Cette méthode de multiplication asexuée d’une souche sélectionnée de Rehmannia glutinosa est encore utilisée. Aujourd’hui, la variété cultivée dans cette région reste d’une qualité exceptionnelle. Elle produit des racines de grande taille, à haut rendement et à forte teneur en catalpol, son composant actif préférentiel (Li et al., 2002, Qiu et al., 2010). Cette souche est également très résistant à la sécheresse, à l’engorgement, aux maladies et aux dégâts causés par les insectes [atteinte dont Rehmannia glutinosa est très sensible et qui peuvent mettre en péril toute une récolte]. Les gens ont progressivement oublié les régions de production initiales de Xianyang et de Tongzhou, dans le Shaanxi, et de Pengcheng et de Jiangning, dans le Jiangsu, qui étaient auparavent connues avant la dynastie Song comme des zones de production traditionnelles de 地黄 Dì Huáng.

Les matières médicinales Daodi ne sont pas fixes et immuables.

En coopération avec les universités et les instituts de recherche, les fabricants de produits pharmaceutiques se sont engagés dans les « Bonnes pratiques agricoles (BPA) pour les matières médicinales traditionnelles chinoises », appliquées par le gouvernement chinois depuis 2002 (Fig. 2). Cela a permis d’étendre les régions de production des MMD et de permettre l’émergence de nouvelles MMD.
Par exemple :

  • Salvia miltiorrhiza Bunge (source de 丹参 Dān Shēn Radix et Rhizoma Salviae Miltiorrhizae). Le Sichuan est le plus grand producteur de cette substance médicinale traditionnelle Daodi, qui est cultivée dans le comté de Zhongjiang au Sichuan depuis plus de 100 ans. Néanmoins, les entreprises modernes de phytothérapie ont désormais établi de nouveaux sites de plantation standardisés à grande échelle de Salviae miltiorrhiza à Shangluo, dans la province du Shaanxi.
  • Cornus officinalis Siebold et Zucc. (source de 山茱萸 Shān Zhū Yú Fructus Corni), traditionellement produit dans la province de Zhejiang (en particulier les régions de Lin’an et de Chun’an), est désormais cultivé sur de nouveaux sites de plantation normalisés établis par certaines entreprises de phytothérapie dans les provinces de Henan et de Shaanxi (Zhao et al., 2012).
Fig. 2. Angelica sinensis (Oliver) Diels (source de 當歸 / 当归 Dāng Guī) Radix Angelicae sinensis) : Bonnes Pratiques Agricoles (BPA/GAP) pour la production de MMD.

6. Le traitement médicinal traditionnel chinois produit des caractéristiques spéciales de la substance médicinale daodi. material

La transformation des « substances médicinales préparées » (炮制 pàozhì) est une technique pharmaceutique qui répond à différentes exigences thérapeutiques, pharmaceutiques et posologiques basées sur la théorie de la médecine traditionnelle chinoise (MTC). L’utilisation de substances médicinales préparées est une caractéristiques spécifique de la MTC (Zhao et al., 2010). Ce n’est qu’après avoir subi certains traitements de tranchage et de transformation prêt à être préparées en décoction [voir règle générale 0213 炮制通则 et chapitre 药材和饮片 Yàocái hé yǐnpiàn du Volume I de la Pharmacopée Chinoise] que les matières médicinales chinoises brutes peuvent être utilisées en clinique. Dans la Pharmacopée chinoise (2010), 591 matière premières (药材 Yàocái) [à base de substances médicinales brutes, comme des racines entières en vrac, etc.] sont répertoriées. Parmi celles-ci, 446 font l’objet de normes établies pour le tranchage et la préparation, ce qui implique 672 différents nouveaux types de « produits médicinaux en morceaux prêt à décocter » (饮片 yǐnpiàn) [certaines substances brutes peuvent être préparées de plusieur manières différentes]. La Pharmacopée Chinoise (2010) précise que les propriétés médicinales, les tropismes des canaux, les fonctions, les indications, l’utilisation et la posologie sont attribués spécifiquement aux « morceaux prêt à décocter » (饮片 yǐnpiàn) en fonction de leur mode de préparation (炮制 pàozhì), et non aux substances médicinales brutes (药材 Yàocái).

Outre l’amélioration de l’efficacité et la réduction de la toxicité des substances médicinales chinoises, l’application des procédés de transformation (炮制 pàozhì) permettent également de produire les caractéristiques spécifiques de certaines produits médicinaux Daodi (道地药材 dàodì yàocái) célèbres.
Par exemple : la racine d’Aconit du Sichuan Aconitum carmichaelii Debeaux 川乌头 Chuān wū tóu [représentante d’un genre botanique réputé pour sa toxicité létale, probablement choisie parmi les autres Aconit pour la forme régulière de ses racines faciles à récolter] peut produire quatre produits transformés différents de 附子 Fù Zǐ Radix Aconiti lateralis Praeparata répertoriés dans la Pharmacopée chinoise (2010) [utilisables sans danger de toxicité mortelle lorsqu’ils ont été correctement préparés] :
黑顺片 Hēi shùn piàn racine latérale d’aconit tranchée noire (hei shun pian – black sliced aconite lateral root) ;
白附片 Bái fù piàn racine latérale d’aconit tranchée blanche (bai fu pian – white sliced aconite lateral root) ;
淡附片 Dàn fù piàn racine latérale d’aconit tranchée salée (dan fu pian – desalted sliced aconite lateral root) ;
炮附片 Pào fù piàn racine latérale d’aconit tranchée frite (pao fu pian – blast-fried sliced aconite lateral root) (Fig. 3).
En outre, dans la région de production Daodi de 附子 Fù Zǐ à Jiangyou, au Sichuan, il existe d’autres formes transformées qui jouissent d’une renommée internationale, telles que :
– racine latérale d’aconit frite (pao fu zi – blast-fried aconite lateral root) [? racine entière] ;
– racine latérale d’aconit tranchée cuite (shou fu pian – cooked sliced aconite lateral root) ;
– racine latérale d’aconit tranchée aplaties (bao fu pian – planed sliced aconite lateral root) ;
黄附片 – racine latérale d’aconit tranchée jaune (huang fu pian – yellow sliced aconite lateral root) [issu de la variété 黄山乌头 Huángshān wū tóu Aconitum carmichaelii var. hwangshanicum (W. T. Wang & P. K. Hsiao) W. T. Wang & P. K. Hsiao].

Fig. 3. Étapes de la transformation de la racine de Aconitum carmichaelii Debeaux (川乌头 Chuān wū tóu) en 附子 Fù Zǐ Radix Aconiti lateralis Praeparata à usage médicinal dans le Bu yi lei gong pao zhi bian lan (Concise Addendum to Grandfather Lei’s Treatise on Herbal Processing) de la dynastie Ming (A) et détails des différents types de 附子 Fù Zǐ transformé figurant dans la Pharmacopée Chinoise (2010) (B).

7. La naturalisation de substances médicinales provenant de l’extérieur de la Chine enrichit les ressources en matières médicinales daodi.

Certaines matières médicinales provenant de l’extérieur de la Chine, parfois inutilisées ou sous-estimées dans leur propre pays, ont été appréciées en médecine chinoise et ajoutés à la Pharmacopée Chinoise, puis les plantes ont été introduites et cultivées en Chine dans des terroirs spécifiques jusqu’à faire désormais partie des MMD. [note : ce processus a pu prendre plusieurs siècles, voir à ce sujet les extraits de la recherche suivante.]
Par exemple :

  • Dolomiaea costus (Falc.) Kasana & A.K.Pandey [syn. : Aucklandia costus Falc.] (source de 木香 Mù Xiāng Aucklandiae radix), était originellement produit en Inde et au Myanmar, historiquement appelé 广木香 Guǎng Mù Xiāng parce qu’il était importé en Chine via Guangzhou (广州 guǎngzhōu). Plus tard, cette plante a été cultivée avec succès dans la province chinoise du Yunnan (云南 yúnnán) et a produit une matière médicinale de bonne qualité alors appelée 云木香 Yún Mù Xiāng. La production n’a cessé d’augmenter et la qualité s’est améliorée. Les résultats de la recherche moderne ont montré que la quantité totale de costunolide et de déhydrocostuslactone contenue dans 云木香 Yún Mù Xiāng était beaucoup plus élevée que celle requise par la Pharmacopée Chinoise (Liang et Gao, 2005), ce qui fait que 云木香 Yún Mù Xiāng est désormais reconnu comme une MMD de la province du Yunnan, vendue dans toute la Chine et distribuée à l’étranger. Des sites de plantation certifiés GAP ont également été établis à Lijiang, dans la province du Yunnan.
  • Crocus sativus L. (source de 番红花 Fān Hóng Huā / 西红花 Xī Hóng Huā) Stigma Croci, était à l’origine produit dans le sud de l’Europe, cultivé en Espagne, en France, en Grèce, en Italie et en Inde. C’est un produit extrêmement coûteux car il faut 160 000 fleurs pour produire un seul kilogramme d’étamines de Safran. Historiquement, il été importé en Chine via le Tibet [où il utilisé de manière religieuse et médicinale – d’où son autre nom 藏红花 Zàng Hóng Huā] et a commencé à être intégré à la pratique médicale chinoise sous la dynastie Ming. Aujourd’hui, il est cultivé avec succès dans les provinces chinoises de Shanghai, Jiangsu et Zhejiang. Des sites de plantation certifiés BPA ont également été établis à Baoshan, Shanghai.
  • Panax ginseng C. A. Mey. (source de 人参 Rén Shēn Radix Ginseng). Alors que le Ginseng chinois était déjà utilisé depuis des milliers d’années, le Ginseng américain Panax quinquefolius L. (source de 西洋参 Xī Yáng Shēn Radix Panacis quinquefolius) poussait sans utilisation médicinale dans les forêts vierges d’Amérique du Nord. En 1702, le père Jartoux, un prêtre français qui avait observé l’utilisation du ginseng chinois en Mandchourie fournit une description physique détaillée et une description de l’environnement où pousse le Panax ginseng en Chine. Fasciné par ses informations, un autre prêtre, le père Joseph Francis Lafitau, découvrit en Amérique du Nord (Canada français) le Ginseng américain près de Montréal en 1716 (Persons, 1994). Plus tard, le Ginseng américain du Canada a été apporté en Chine et est devenu un objet de valeur à la cour impériale. Aujourd’hui, le Ginseng américain est cultivé avec succès à grande échelle en Chine. Des sites de plantation certifiés BPA ont également été établis à Jingyu, dans la province de Jilin.
8. Conclusion : perspectives de recherche

Au cours des siècles passés à traiter les déséquilibres du corps et à tenter de préserver la santé, les ancêtres du peuple chinois ont développé un système médical unique et complet, un héritage culturel précieux aujourd’hui diffusé internationnalement sous le nom de « Médecine Traditionnelle Chinoise » (MTC). La Chine possède également d’abondantes ressources environnementales, supportant la production de matières médicinales diversifiées, qui constituent la base matérielle de l’application de la théorie de la MTC dans la prévention et le traitement des maladies. En tant qu’essence des substances médicinales chinoises, les MMD jouent un rôle important dans le traitement des maladies et la préservation de la santé depuis des milliers d’années et constituent un patrimoine culturel [reliant ressources naturelles et savoir-faire civilisationnel] en péerpétuelle évolution.

Cependant, bien que les MMD jouissent depuis longtemps d’une réputation indéniable tant dans l’industrie médicinale que dans la pratique clinique de la MTC, les aspects de leur « qualité supérieure » n’ont pas encore été élucidés scientifiquement. À l’heure actuelle [en 2012], les falsifications de MMD sur le marché des herbes médicinales entachent sérieusement leur réputation. L’absence d’orientations techniques déterminées pour encadrer leur production a une influence négative sur la préservation et la pérénité de leur utilisation.

La communauté scientifique a réalisé l’importance d’une recherche systématique sur la MMD. Des mesures pluridisciplinaires ont été adoptées pour explorer les méthodes scientifiques et pratiques de recherche sur le sujet. Les efforts de recherche des 20 dernières années et les résultats obtenus depuis 1980 ont été compilés. Il a été suggéré que les recherches futures se concentrent sur les aspects suivants de la MMD :
– (1) l’authentification des espèces et des zones de production ;
– (2) l’établissement et la mise en œuvre de critères de spécification commerciale ;
– (3) la plantation et la transformation normalisées (Xiao et al., 2009).

En février 2011, la 390e session de la Conférence scientifique de Xiangshan a discuté des études systématiques des attributs et des facteurs contribuant aux MMD. Selon cette conférence, les trois aspects suivants devraient être renforcés dans les recherches futures :
– (1) l’application des méthodes de génétique quantitative pour explorer la base du matériel génétique afin de révéler le mécanisme moléculaire de la formation de la matière médicinale Daodi ;
– (2) l’application des omiques et de la biologie des systèmes pour élucider les facteurs contribuant à la matière médicinale Daodi ;
– (3) l’application de l’authentification géographique et la protection des droits de propriété intellectuelle de la matière médicinale daodi sur la base de ses caractéristiques biologiques, chimiques et pharmacologiques (Pan, 2011).

Récemment, la recherche sur la matière médicinale daodi a été inscrite sur la liste des projets clés parrainés par la Fondation nationale des sciences naturelles de Chine et les efforts de recherche susmentionnés sont en cours.

Néanmoins, la clarification du concept et la compréhension de la formation et des changements historiques de la matière médicinale daodi sont des conditions préalables à la poursuite de la recherche.

Medicinal plants of the Chinese Pharmacopoeia and Daodi: insights from phylogeny and biogeography (Di Lei et al., 2018)

Cette étude procède à une analyse statistique par familles et par régions des herbes Daodi comparée à l’ensemble de la Pharmacopée Chinoise (2015). Les résultats s’avère être principalement en opposition avec les attentes supposées, mais permettent de comprendre certains mécanismes-clefs du choix des plantes médicinales et de la mise ne place de zones de culture Daodi.

La Pharmacopée chinoise (2015) comprend 584 médicaments à base de plantes, dont 284 contiennent également des sous-ensembles de haute qualité, appelés « herbes Daodi« , où Daodi dénote des propriétés cliniques supérieures par rapport à des homologues non Daodi, bien qu’ils proviennent de la même espèce.
Le matériel médicinal Daodi provient de régions géographiques désignées où les conditions, notamment le climat, le sol et les techniques de culture (dans le cas des plantes), de récolte et de traitement, sont censées conférer une supériorité clinique (Zhao et al., 2012).

Au fil des siècles, la composition des herbes Daodi a changé et les lieux de production des Daodi ont également changé. Les localités Daodi elles-mêmes peuvent être assez étroites et il peut y en avoir plus d’une.

Les régions Daodi sont des régions à grande échelle, correspondant approximativement à des régions administratives, auxquelles les herbes Daodi peuvent être attribués. Il existe différents concepts de régions Daodi :
– Aujourd’hui, il y a dix régions Daodi (selon la classification de Hu en 1989) : Guan, Bei, Huai, Zhe, Nan, Guang, Yun, Gui, Chuan et Xi.
– Sous la dynastie Tang, il y avait déjà 10 « Dao« , mais ils se référaient à des régions différentes.
– Même si le nom d’une région est conservé, la zone spécifique peut changer ou contenir différentes espèces d’herbes Daodi.
Par exemple : sous la dynastie Tang, la région « Guan », où est cultivé Panax ginseng C.A.Mey (source de 人参 Rén Shēn Radix Ginseng) de qualité Daodi, ne faisait pas partie du territoire Chinois de l’époque. À cette époque, le meilleur Ginseng chinois était produit dans la région de Shangdang, dans la province du Shanxi, qui fait partie de l’actuelle région « Bei ».

Malgré leur importance clinique et économique, les régions Daodi et herbes Daodi n’ont jamais été explicitement précisés dans aucune édition de la Pharmacopée Chinoise.

NomsProvincesBiomes
关 GuānHeilongjiang, Jilin, LiaoningForêts tempérées froides de conifères à feuilles caduques, forêts tempérées mixtes de conifères à feuilles larges, forêts tempérées chaudes de feuillus à feuilles larges et forêts tempérées de graminées.
北 BěiShanxi, Hebei, Tianjin, Beijing
Forêt de feuillus tempérée chaude
懷 / 怀 HuáiHenan
Forêt tempérée de feuillus
南 NánJiangsu, Shanghai, Jiangxi, Anhui, Hubei, FujianForêt subtropicale de feuillus persistants
浙 ZhèZhejiang et son abord continentalForêt subtropicale de feuillus persistants
關 / 关
Guān
Guangdong, Guangxi, Hainan, and TaiwanForêt subtropicale de feuillus persistants, Forêt tropicale de mousson, forêt pluviale
雲 /云 YúnYunnanForêt subtropicale de feuillus persistants, Forêt tropicale de mousson, forêt pluviale
鬼 GuǐGuizhouForêt subtropicale de feuillus persistants
川 ChuānSichuan, ChongqingForêt subtropicale de feuillus persistants
西 XīInner Mongolia, Gansu, Ningxia, Shaanxi, Qinghai, Xizang, XinjiangPrairies tempérées, forêts tempérées chaudes de feuillus, zones désertiques, Végétation Alpine du Plateau Tibétain
Table 1: 10 régions Daodi
Traits of Daodi compared to remainder of Chinese Pharmacopoeia

Les espèces sources d’herbes Daodi sont significativement plus susceptibles d’être utilisées pour leurs racines (parties souterraines autres que les bulbes, y compris les racines, les rhizomes, les tubercules, etc.) que les autres herbes de la Pharmacopée Chinoise qui ne sont pas sources d’herbes Daodi. Les racines sont la partie de la plante la plus répandue dans la Pharmacopée Chinoise 2015 (>30% du total), et la surreprésentation des racines dans Daodi pourrait être due au fait que les racines sont plus souvent soumises à des possibilités de substitution.
Exemple : 沙参 Shā Shēn Radix Adenophorae était à l’origine issu de la racine de Adenophora tetraphylla (Thunb.), une plante de la famille des Campanulaceae originaire des sols sableux des montagnes de basse altitudes du sud de la Chine. Au XVIIe siècle, lorsque le commerce à longue distance est devenu plus courant, l’espèce alternative Glehnia littoralis (A. Gray) F. Schimidt ex Miq., une plante de la famille des Apiaceae poussant plus proche du littoral, est devenue la source substituée préférée de Shā Shēn (Leon et Yu-Lin, 2017). Ainsi, les préfixes des régions Daodi permettrait aux utilisateurs d’effectuer la distinction entre les deux sources* :
北沙参 Běi Shā Shēn Radix Glehniae (issu de Glehnia littoralis (A.Gray) F.Schmidt ex Miq. ; Apiaceae) provenant de la région Daodi Bei ;
南沙参 Nán Shā Shēn Radix Adenophorae (issue de Adenophora triphylla (Thunb.) A.DC. ; Campanulaceae) provenant de la région Daodi Nan.

Il existe de nombreux exemples de préfixes Daodi appliqués à des racines, mais il est inhabituel que deux espèces alternatives pour le même produit soient Daodi.
Exemples de substituts où une espèce est nommée avec un préfixe régional [et parfois, par effet retour après-coup, la première espèce reçoit également un préfixe pour la distinguer objectivement]* :
(怀)牛膝 (Huái) Niú Xī Radix Achyranthis (issu de Achyranthes bidentata Blume ; Amaranthaceae) et 川牛膝 Chuān Niú Xī Radix Cyathulae (issu de Cyathula officinalis Kuan ; Amaranthaceae) ;
(云)木香 (Yun) Mù Xiāng (issu de Dolomiaea costus (Falc.) Kasana & A.K.Pandey [syn. : Aucklandia costus Falc.] ; Asteraceae) et 川木香 Chuān Mù Xiāng (issu de Dolomiaea souliei (Franchet) Shih [syn. : Vladimiria souliei (Franch.) Shih] ; Asteraceae) ;
射干 Shè Gān Rhizoma Belamcandae (issu de Iris domestica (L.) Goldblatt & Mabb. [syn. : Belamcanda chinensis (L.) Redouté] ; Iridaceae) et 川射干 Chuān Shè Gān (issu de Iris tectorum Maxim. ; Iridaceae).

*Remarque : la plupart du temps, lors d’une substitution, les deux espèces sont proches (même genre, ou même famille) avec de fortes ressemblances morphologiques ou éco-systémiques, mis à part pour quelques exceptions comme l’exemple précédent de 沙参 Shā Shēn.

Tentatives d’explication :
La désignation Daodi pour distinguer les espèces de substitution peut être particulièrement répandue parce que les racines sont difficiles à identifier ; la désignation de la région d’origine pour distinguer les espèces de substitution serait ainsi souhaitable si l’une était préférée à l’autre en raison d’une supériorité clinique perçue. […]
Une autre explication possible de la surreprésentation des racines dans les herbes Daodi par rapport aux autres plantes de la Pharmacopée Chinoise est que l’accumulation d’actifs biologiques dans les racines varie davantage en fonction des conditions climatiques et édaphiques. Il existe peu d’études [en 2018, mais cet aspect a été approfondis durant ces dernières années] démontrant les effets du climat ou des sols sur la phytochimie ; une de ces études a montré que les racines cultivées en haute altitude sont plus actives sur le plan phytochimique (Kishore et al., 2010).
Les herbes Daodi apapraîssent être statistiquement plus susceptibles de tempérament « chaud » ou « tiède« . Seules 13 plantes médicinales de la MTC (provenant de 15 espèces linnéennes différentes) sont enregistrées comme plantes médicinales « chaudes » dans la Pharmacopée Chinoise 2015, alors que 11 herbes de la MTC (13 espèces) figurent parmi les herbes Daodi. Par rapport aux autres substances non Daodi de la Pharmacopée Chinoise 2015, on observe une prévalence pour les tropismes « péricarde » et « vessie« . Au total, 34 herbes ciblent le méridien « vessie« , dont 28 sont de tempérament « chaud« . La prévalence de ces organes cibles peut être attribuée à la forte représentation des herbes classées comme de tempérament « chaud » et « tiède« .
Six des quinze plantes médicinales de la pharmacopée classées comme de tempérament « chaud » présentent également un caractère « toxique » [selon la définition des produits médicinaux traditionnels de la Pharmacopée Chinoise Vol. I]. […] Nous nous attendions à ce que les plantes médicinales de caractère « toxique » soient surreprésentées dans les herbes Daodi, car il est prouvé que certaines espèces présentent des variations intraspécifiques dans la présence de composés toxiques, par exemple chez Acorus L. (Bertea et al., 2005) [source de 石菖蒲 Shí Chāng Pú Rhizoma Acori], et toute information susceptible d’aider à différencier le matériel toxique du matériel non toxique pourrait être d’une grande valeur. Cependant, contrairement à nos attentes, moins d’espèces d’herbes Daodi étaient [considérées comme] « toxiques« .

Endemicity

Les herbes Daodi et la Pharmacopée Chinoise ont moins d’espèces endémiques que ce que nous envisagions, étant donné la proportion très élevée (49%) d’espèces endémiques dans la Flore de Chine. En revanche, moins de 15 % des espèces végétales incluses dans la Pharmacopée Chinoise (2015) ne sont distribuées qu’en Chine. La faible endémicité des herbes Daodi et des plantes de la Pharmacopée Chinoise pourrait être attribuée à l’intégration de plantes étrangères dans le corpus chinois de connaissances sur les plantes médicinales.
Exemple : le Safran Crocus sativus L. (source de 番红花 Fān Hóng Huā Stigma Croci) originaire du Moyen-Orient et le Bois de Kuth Dolomiaea costus (Falc.) Kasana & A.K.Pandey (source de 云木香 Yun Mù Xiāng) originaire du plateau himalayen, sont des espèces non indigènes actuellement cultivées en Chine comme plantes médicinales officielles de la Pharmacopée Chinoise.

Il existe également des exemples d’espèces importées cultivées en Chine et devenant envahissantes. Certaines plantes Daodi sont également considérées comme des espèces exotiques envahissantes :
Aloe vera (L.) Burm. f. (source de 芦荟 Lú Huì Aloe) dans la région Daodi Guang ;
Gypsophila vaccaria (L.) Sm. (source de 王不留行 Wáng Bù Liú Xíng Semen Vaccariae) ;
Cannabis sativa L. (source de 火麻仁 Huǒ Má Rén Semen Cannabis) dans la région Daodi Bei.
Les espèces exotiques envahissantes représentent moins de 1% de l’ensemble de la flore [de Chine] et le même pourcentage parmi les herbes Daodi, mais ces espèces représentent plus de 3% de la dernière édition de la Pharmacopée Chinoise, ce qui suggère que la culture de plantes non indigènes à des fins médicales peut engendrer l’établissement d’espèces exotiques envahissantes.

La faible proportion d’espèces endémiques au sein des herbes Daodi et de la Pharmacopée Chinoise pourrait également être attribuée à une préférence pour les plantes originaires de Chine mais également distribuées en dehors de la Chine (Tan 2016). Cela pourrait s’expliquer par le fait que les espèces largement répandues sont souvent des espèces exotiques envahissantes, et il est bien connu que les plantes médicinales comprennent de nombreuses espèces exotiques envahissantes (Weber et al., 2008). L’utilisation d’espèces exotiques envahissantes est attribuée à la disponibilité des plantes, qui facilite l’utilisation médicinale. Les propriétés médicinales d’une plante plus répandue ont plus de chances d’être découvertes, et suite à cette découverte, la connaissance de l’utilisation médicinale peut se répandre dans l’ensemble de l’aire de répartition de l’espèce. La Route de la soie est l’une des voies par lesquelles l’échange de connaissances pourrait être notable.
Pour étayer l’idée que les connaissances traditionnelles sur les plantes médicinales chinoises sont partagées en dehors de la Chine, nos données montrent que les lignées de plantes préférées en Chine ressemblent davantage à celles du Népal qu’à celles des autres régions, de l’Afrique du Sud et de la Nouvelle-Zélande. De nombreux chercheurs ont affirmé que la médecine tibétaine combine les systèmes de pensée médicale indiens, chinois et occidentaux (Beckwith 1979 ; Stein 1972 ; Meng et al., 2009). Concernant la composition taxonomique de la Pharmacopée Chinoise et du sous-ensemble d’herbes Daodi par rapport à la Pharmacopée Chinoise. Les Fabaceae sont la famille la plus importante de la Pharmacopée Chinoise, et sont également importantes pour le Népal, bien qu’elles ne soient pas significativement importantes pour le Cap d’Afrique du Sud, ni pour la Nouvelle-Zélande. La relation entre les classements chinois et népalais pourrait être due à des connaissances traditionnelles partagées entre ces deux régions, ou à la présence des mêmes lignées importantes. Il y a plusieurs autres familles qui, comme les Fabaceae, sont importantes en Chine et au Népal, mais pas en Afrique du Sud ou en Nouvelle-Zélande. Il s’agit des Rutaceae, des Zingibéraceae et des Cucurbitaceae.

La comparaison des niveaux d’endémisme dans les herbes Daodi et dans la Pharmacopée Chinoise montre qu’il y a beaucoup plus d’espèces endémiques parmi les herbes Daodi que dans la Pharmacopée Chinoise. Il semble que les herbes Daodi incluent peu d’espèces importées parce qu’il faut beaucoup de temps pour établir la supériorité clinique d’un sous-ensemble de plantes.
Exemples :
– le Piment sud-américain Capsicum annuum L. (source de ???) a été introduit en Chine à la fin du 16e siècle. Il est enregistré comme espèce médicinale dans la Pharmacopée Chinoise (2015) mais n’a jamais été reconnu comme herbe Daodi.
– la Noix de Muscade Myristica fragrans Houtt. (source de 肉豆蔻 Ròu Dòu Kòu Semen Myristicae) a été introduite avant le 3e siècle, en provenance d’Indonésie, mais elle est reconnue comme ayant une composante Daodi provenant de la région Daodi Guang.

Voir aussi :
Documenting the heritage along the Silk Road: An ethnobotanical study of medicinal teas used in Southern Xinjiang, China (2020)

The scientific elucidation of daodi medicinal materials. in Chin Med 15, 86 (Liu, X., Zhang, Y., Wu, M. et al., 2020).

Cette étude analyse les aspects traditionnels qui influencent la qualité des « herbes Daodi » et propose de nouveaux critères “modernes” d’évaluation des produits.

Les matières médicinales Daodi (MMD) [= « herbes Daodi« ], qui présentent « des caractéristiques uniques et des environnements de culture écologiques spécifiques, sont reconnues comme des produits médicinaux de haute qualité parmi les matières médicinales chinoises (CMM). L’évaluation de la qualité des MMC est fondamentale pour la normalisation. Le concept et l’application des MMC ont une longue histoire, décrite dans les livres anciens et ancrée dans la pratique et l’expérience au fil des générations. Le terme DMM désigne des plantes médicinales pures et de qualité supérieure présentant les caractéristiques suivantes : saison de récolte optimale (reflétant le stade de développement approprié de la plante), traitement scrupuleux, technologie de préparation traditionnelle, etc. Le DMM et les produits médicinaux de haute qualité étant traditionnellement considérés comme étroitement liés, des études scientifiques modernes confirmant l’association de ces produits sont décrites.
Dans l’Antiquité, l’identification des DMM était généralement basée sur les caractéristiques apparentes, et cette approche dépendait dans une certaine mesure d’expériences et d’hypothèses empiriques. Actuellement, les techniques analytiques scientifiques modernes peuvent être appliquées pour confirmer la validité des associations entre les produits médicinaux de haute qualité et les DMM afin de garantir leur utilité, en clarifiant la compréhension scientifique des matériaux médicinaux Daodi.

Histoire
  • Les DMM ont été mentionnés pour la première fois dans « Zhen Zhu Nang Yao Xing Fu ».
  • Le terme « herbes Daodi » est largement répandu dans « Ben Cao Pin Hui Jing Yao (Essentials of Materia Medica Distinctions) », un ouvrage compilé par l’hôpital impérial sous la dynastie Ming (1368-1644 après J.-C.), dans lequel 268 plantes médicinales sont répertoriées. La mention « source originale » a été officiellement inscrite sous chaque rubrique de plante médicinale, précisant les régions de production des herbes Daodi.
  • De nos jours, les « herbes Daodi » constituent la base de l’industrie médicinale et de la pratique clinique et font référence à la qualité nettement supérieure des matières médicinales qui poussent dans une certaine région. De nombreux noms de DMM reflètent les connotations des régions de production.
    Exemple : « Qin pi » (Fraxinus chinensis Roxb.), « Fen qi » (Astragalus mongholicus Bunge), « Huai di huang » (Rehmannia glutinosa Libosch.) et « Ba dou » (Croton tiglium L.), où « Qin« , « Fen« , « Huai » et « Ba » renvoient aux noms de régions Daodi utilisés au cours de l’ancienne dynastie des Zhou occidentaux.

Populations (végétales) : différentes régions ont domestiqué ou récolté des populations de plantes aux génotypes et phénotypes différents.
Différents environnements de croissance peuvent grandement influencer la qualité et les composants chimiques de populations étroitement apparentées. La recherche expérimentale moderne, en particulier l’identification biologique moléculaire, a validé que les différentes zones de production des CMM sont étroitement liées à la qualité et à la divergence des séquences d’ADN des CMM. La diversité génétique entre populations de différentes régions de culture depuis longtemps différentiées est souvent observée, à l’exception dans certains cas de marqueurs d’ADN hautement conservés.
Par exemple :
Pogostemon cablin (Blanco) Benth. (source de 关藿香 Guān Huò Xiāng Herba Pogotsemoni) : le patchoulol et la pogostone sont les constituants dominants. Les herbes Daodi sont produites à deux endroits différents. Le produit cultivé à Shipai (dans la ville de Guangzhou, province du Guangdong, SP) et à Gaoyao (dans la ville de Zhaoqing, province du Guangdong, GY) différait du produit cultivé dans la province de Hainan (HN) et dans la ville de Zhanjiang (en Province du Guangdong, ZJ) non seulement en termes de quantité totale d’huile volatile mais également en termes de génotype. Selon la composition de l’huile volatile, P. cablin est divisé en deux chémotypes : les cultivars SP et GY appartiennent au type pogostone, tandis que les cultivars HN et ZJ appartiennent au type patchoulol. La divergence de séquence des gènes d’ARNr matK et 18S parmi 6 échantillons de P. cablin provenant de différents endroits est corrélée aux régions de culture et aux chémotypes intraspécifiques des huiles essentielles.
Cnidium monnieri (L.) Cuss. (source de 蛇床子 Shé Chuáng Zǐ Fructus Cnidii Monnieri) : les principaux constituants sont des coumarines. Les plantes cultivées ont été classées en trois chémotypes selon les chémotypes de coumarine : les furanocoumarines osthol-linéaires (chémotype I), principalement cultivé dans les régions des provinces du Jiangsu et du Hunan ; les furanocoumarines angulaires (chémotype II), principalement produites dans la province du Heilongjiang ; et le type de transition (chémotype III), provenant en grande partie des régions du Henan et du Hebei. Il a été constaté qu’il y avait 12 sites variables dans la séquence du gène matK de C. monnieri provenant de différentes populations. Un arbre phylogénétique construit par la méthode de jonction de voisins (NJ) a montré que la relation phylogénétique de 6 cultivars de C. monnieri était bien corrélée à leur répartition géographique et aux chémotypes coumariniques intraspécifiques de (Fig. 3).
Dendrobium officinale Kimura et Migo (source de 石斛 Shí Hú Caulis Dendrobii) : des recherches en laboratoire ont montré une nette corrélation entre la séquence ITS de l’ADNr et le phénotype de différentes populations.
Acorus calamus L. (source de ??? ) : la relation phylogénétique prédite par les données de la région d’espacement de l’ARNr 5S était bien corrélée au chémotype de l’huile essentielle de plantes collecté à divers endroits.
Fritillaria thunbergii Miq. (source de 浙贝母 Zhè Bèi Mǔ Bulbus Fritillariae thunbergii) : la différence dans la teneur en alcaloïdes provenant de divers habitats ne résulte pas d’une variation de la séquence de l’ARNr 5S mais du microenvironnement. Il a été rapporté que l’ARNr 5S est hautement conservé chez toutes les espèces, ainsi, différents environnements n’ont pas produit de changements dans l’ARNr 5S des différentes populations de F. thunbergii, mais ont produit des différences dans les métabolites secondaires.

Moment de la récolte :
Chaenomeles speciosa (Sweet) Nakai (source de 木瓜 Mù Guā Fructus chaenomelis) produit les meilleurs rendements en termes de qualité lorsqu’il est récolté au début du mois de juillet.

Ensoleillement :
Houttuynia cordata Thunberg (source de 鱼腥草 Yú Xīng Cǎo Herba Houttuyniae) : la teneur en composants volatils comme les monoterpénoïdes et les non-terpénoïdes est étroitement liée à l’intensité lumineuse ; ceux-ci sont respectivement corrélés positivement et négativement à l’intensité lumineuse.
Viola yedoensis Makino [syn. : Viola philippica var. philippica] (source de 紫花地丁 Zǐ Huā Dì Dīng Herba violae) : la teneur en flavonoïdes et en coumarines était positivement corrélée à l’intensité lumineuse.

Sol :
Citrus grandisTomentosa‘ [syn. : Citrus maxima (Burm.) Merr.] (source de ?Zhi Qiao) : la teneur en cuivre (Cu), zinc (Zn), manganèse (Mn), bore (B) et molybdène (Mo) disponibles dans le sol est positivement associée aux concentrations de flavonoïdes et de naringines.
Schisandra sphenanthera Rehd. et Wils (source alternative de 五味子 Wǔ Wèi Zǐ Fructus Schisandrae) : le manganèse (Mn) du sol est un facteur favorable à l’accumulation de schisanthérine-A dans les fruits.

Eau :
Aconitum carmichaelii Debeaux (source de 附子 Fù Zǐ Radix Aconiti lateralis et 川乌头 Chuān Wū Tóu Radix Aconiti) : les concentrations de métaux lourds cadmium (Cd), arsenic (As), mercure (Hg) et plomb (Pb) ont été positivement associées à l’eau de la rivière Fujiang.

Facteurs écologiques globaux :
Aconitum carmichaelii Debeaux produite dans les sites de plantation du comté de Jiangyou, dans la province du Sichuan, est considérée comme étant de qualité supérieure. Les proportions des principaux constituants bioactifs, les alcaloïdes monoesters, par rapport aux constituants toxiques, les alcaloïdes diesters, parmi 5 échantillons d’A. carmichaelii provenant de différentes localités, étaient bien corrélées avec leurs régions de culture. La proportion la plus élevée a été observée dans le cultivar ‘Jiangyou’ (province de Sichuan), suivi des cultivars ‘Hanzhong’ (province de Shaanxi), ‘Butuo’ (province de Sichuan), ‘Weishan’ (province de Yunnan) et ‘Anxian’ (province de Sichuan).
Scutellaria baicalensis Georgi (source de 黄芩 Huáng Qín Radix Scutellariae baicalensis), la plupart des constituants chimiques étaient négativement corrélés à la latitude et positivement corrélés à la température. En général, les teneurs en 21 constituants chimiques étaient plus élevées aux basses latitudes qu’aux hautes latitudes. Une analyse de régression graduelle a montré que la teneur en baicaline de S. baicalensis était négativement corrélée à la latitude. De même, la teneur en éléments inorganiques du sol était excessivement élevée (magnésium (Mg) et calcium (Ca) exclus), ce qui a eu un effet négatif sur l’accumulation des constituants chimiques dans S. baicalensis.

Conclusion :

L’étude propose en conclusion que l’élucidation scientifique des herbes Daodi pourrait également passer par l’évaluation des critères suivants :

  • Composés bio-chimiques ;
  • Fonctions pharmacologiques.

→ Ces critères scientifiques ne peuvent-ils finalement pas être rapprochés des champs “composition chimique“ et “critères de qualité” de la Pharmacopée Chinoise ? Nous verrons par la suite comment ces deux deux aspects orientent aujourd’hui une grande partie de la recherche scientifique.

En conclusion : 
Nous apprenons que les plantes utilisées par la médecine chinoise sont le plus souvent des plantes très comopolites, adaptables et malléable, mais que la grande diversité des paysages chinois combiné au savoir faire agonomique traditionnel et à la capacité d'observation clinique des médecins antiques ont permis l'apparition de cultivars sélectionnés mis en valeur par des conditions géo-climatiques ponctuellement favorables à l'exacerbation de propriétés médicinales intrinsèques.
La malléabilité de ces plantes permet donc potentiellement leur mise en culture hors des régions Daodi traditionnelles (que cela soit en Chine ou en dehors) pour peu que les conditions envirronementales soient similalires (avec la question cruciale des symbioses microbiennes spécifiques).
Toutefois, la compréhension des facteurs environnementaux des régions Daodi et la culture des souches domestiquées pour leur caractère médicinal est donc une double nécessité dans l'optique d'une tentative de culture hors des régions Daodi traditionnelles.

(à suivre…)

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