L'entreprise VERT NATURE récolte de l'Armoise et la transforme en moxas depuis deux générations. Cette entreprise encore unique en son genre en Europe cherche actuellement de nouveaux repreneurs. Visite guidée avec les actuels gérants.
Bonjour Chantal & Frédéric, pouvez-vous vous présenter ?
Chantal Robert : Après avoir acquis une grande expérience commerciale de plus de 20 ans, je suis diplômée en biomagnétisme et modelage ayurvédique. J’ai pratiqué des soins dans ces disciplines, ainsi que la moxibustion pendant plusieurs années dans un cabinet de soins à Mauguio. Je n’exerce plus depuis 2010, afin de me consacrer pleinement et exclusivement à l’activité de fabrication et distribution des produits VERT NATURE.
Frédéric Chevalier : Diplômé ingénieur ECAM généraliste, et Master DESS CAAE de gestion d’entreprise, j’ai abandonné mes autres fonctions en entreprise en 2013 pour me consacrer pleinement et exclusivement à l’activité de fabrication et de distribution des produits VERT NATURE.
Comment est née l’entreprise VERT NATURE ?
En 1985, Colette & Lucien Parent ont créé une activité de production de moxas en France initialement pour soigner leurs enfants d’origine asiatique, c’était encore unique en Europe. Nous leur avons rendu visite à l’occasion de vacances en Auvergne en 2005, à la suite d’un article paru dans la presse régionale.
L’annonce de leur départ en retraite prochaine nous a immédiatement mis sur les rails de la reprise de leur activité, justifié par nos profils complémentaires associant d’une part la connaissance de médecines alternatives dont la moxibustion pour Chantal, et le métier d’ingénieur pour Frédéric afin d’assurer la production, complétés par nos expériences passées en création d’entreprise.
Préparant leur retraite bien méritée, Colette et Lucien nous ont alors choisis pour reprendre leur entreprise afin de pérenniser leur production appréciée par une clientèle toujours plus nombreuse et fidèle.
C’est donc en 2007 que nous avons pris pied dans cette belle aventure, avec le soutien chaleureux de Colette et Lucien mais aussi de nombreux clients déjà séduits par la qualité supérieure des produits fabriqués et attachés à leur pérennité.
Colette et Lucien nous ont distillé tout leur savoir-faire, et c’est avec fierté et passion que nous avons repris le flambeau, en poursuivant sans relâche l’objectif de produire la qualité optimale tout au long du processus de récolte, de fabrication et de distribution.
Vous êtes actuellement installés à côté de Montpellier, dans la région méditerranéenne, comment le déménagement s’est il opéré ?
Nous avons démarré l’activité en Auvergne à proximité du lieu d’origine où nous disposions d’un local pour stocker la récolte et les machines, et où nous avons pu identifier une ressource en armoise suffisante à l’époque, quoique disséminée. Mais nous habitions déjà à 500Km de ce lieu, ce qui était lourd à gérer, en particulier en phase de démarrage et de formation.
La prospection active et continue alors menée autour de notre lieu d’habitation près de Montpellier nous a conduit, année après année, à identifier des parcelles (et leurs propriétaires) répondant à nos besoins croissants en armoise, dans des zones préservées sans phytosanitaires. La recherche continue prouve finalement qu’on trouve de l’armoise un peu partout !
Puis la recherche d’un local adapté, proche et à un loyer raisonnable, a abouti assez rapidement. Il ne restait plus qu’à organiser le transport des machines sur camion-remorque avec grue, et leur démontage remontage, qui s’est finalement avérée l’étape la plus simple.
Ce changement de climat a-t-il une influence sur la production ?
L’armoise commune est assez courante dans la plupart des régions, en dessous de 1000m, seule sa croissance varie, ainsi que la période de récolte: elle est à maturité fin juillet dans le nord de l’Auvergne, et mi-juin dans notre région méridionale où le climat est plus chaud. Elle est beaucoup plus ramifiée en Auvergne, mais finalement moins productive que dans le sud où elle bénéficie d’un ensoleillement optimal. (NdE : les feuilles sur les ramifications secondaires sont moins larges.)
La croissance est très variable d’une année sur l’autre, et même d’une parcelle à l’autre. Une année très chaude et peu arrosée peut s’avérer très favorable, l’inverse est aussi vrai. l’idéal est de multiplier les parcelles pour mutualiser les risques.
Quelle espèce de plantes utilisez-vous ?
Nous n’utilisons qu’une variété d’armoise cosmopolite et largement répandue en France : Artemisia vulgaris L., qui est présente dans tout le continent Eurasien, jusqu’en Chine, et qui s’est même naturalisée en Amérique. C’est une plante herbacée vivace de la famille des Asteraceae.
En France, on l’appelle également Armoise commune, ou de noms explicites quant à son usage tels que « herbe de la Saint Jean », « herbe à feu », « tabac de Saint Pierre ».
Il existe de nombreuses autres espèces recensées du genre Artémisia. Les plus connues chez nous étant l’Estragon, l’Absinthe, et le Génépi, pour des usages très diversifiés.
Comment la plante est-elle cultivée ?
L’Armoise que nous récoltons n’est pas cultivée, il s’agit d’une cueillette « sauvage ». Elle pousse naturellement sans insecticide, sans pesticide ni engrais chimique dans des zones d’agriculture biologique. Le lieu où elle grandit lui confère des vertus spécifiques en raison du climat et de l’altitude.
Comment se passe la récolte ?
L’Armoise atteint le summum de ses qualités au solstice d’été. Elle est récoltée les jours feuilles ou fleurs du calendrier lunaire, tels les druides coupant le gui et retrouvant dans ces gestes toute une symbolique.
Les plantes sont coupées à la main à l’aide d’un sécateur, tige par tige et réunies en bouquets, suspendus dans un séchoir aéré sous abri, la tête en bas afin d’être dynamisés au maximum.
Comment procédez-vous à la transformation en moxa ?
Après quelques mois, l’armoise est sèche. Commence alors l’effeuillage en machine.https://dai.ly/x3cy4prhttps://www.dailymotion.com/video/x3cy4pr
Après broyage, l’armoise est essentiellement conditionnée dans notre atelier sous forme de rouleaux de différents diamètres, enrobés d’un simple papier cigarette spécial, très fin et résistant. Ces rouleaux se nomment « moxas » en chinois, mot qui provient du japonais « mogusa » qui signifie « feu prolongé ».
Comment avez vous mis en place votre chaîne d’outils ?
provenance des machines ?
Comment avez-vous mis en place votre chaîne d’outils ?
Les machines sont une effeuilleuse de fabrication artisanale associée à un broyeur robuste, ainsi que 2 équipements réformés issus de la SEITA (à l’origine pour la production de cigares et cigarettes) adaptés à la fabrication des moxas. Leur très grande capacité de production permet un usage annuel très limité pour produire la quantité de moxas annuelle.
Une formation par nos soins est cependant requise (et prévue) pour maîtriser leur usage dans notre contexte, ainsi qu’une vertu cardinale : la patience !
Ce sont toutefois des machines certes anciennes, mais très robustes et mécaniques, sans aucune électronique complexe à dépanner, nécessitant peu d’entretien, et dont la durée de vie est quasi illimitée dans nos conditions d’utilisation.
Nous utilisons également du petit outillage: une coupeuse pour la mise en boîtes, ainsi que scie, perceuse colonne, etc pour réaliser les accessoires en bois .
Comment concevez-vous vos produits ?
La moxibustion a été inscrite en 2010 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO
Les moxas ont été inventés et utilisés depuis plus de deux millénaires, et utilisés sur tous les continents, et leur efficacité n’est à ce titre plus à démontrer. Leur avenir en est de ce fait certainement garanti pour d’autres millénaires sans qu’il ne soit ni nécessaire, ni souhaitable d’en révolutionner la conception.
Nous sommes très attachés à respecter les traditions séculaires pour fabriquer nos moxas, depuis la récolte à la main au solstice d’été en respectant le calendrier lunaire, avec exclusivement des plantes sauvages que la nature nous offre généreusement là où elle s’épanouit, jusqu’à la simplicité des modes de production pour assurer une qualité optimale.
Nous avons pour cela réuni à deux toutes les compétences nécessaires pour assurer en autonomie toute la chaîne de valorisation de nos produits, essentiellement mécanique, menuiserie, informatique, gestion, commercial, sans oublier des compétences humaines de patience, de résilience, et d’envie d’entreprendre.
VERT NATURE a simplement privilégié la minimisation de l’usage de papier, sans encre, pour diminuer au maximum la nuisance des fumées, sans dénaturer l’essence du produit basé sur la combustion de la plante sélectionnée et pure. Nos produits sont de ce fait plébiscités depuis près de 40 ans pour leur puissance et leur agrément d’usage incomparable vis à vis des seuls produits concurrents, tous d’origine asiatique.
Comment distribuez-vous votre production ?
Nous avons résolument choisi un mode de distribution exclusivement en direct avec nos clients (site Internet en e-commerce à 95%) sans aucun intermédiaire, pour garantir le meilleur retour d’expérience et l’amélioration continue de nos procédés de fabrication. Pas d’emballage ni de marketing superflu, juste l’essentiel: le produit.
Notre clientèle est constituée essentiellement de professionnels de la médecine chinoise, dont les écoles en France sont nombreuses, et dont leurs professeurs sont nos principaux prescripteurs. Il arrive aussi que leurs patients nous commandent en direct soit sur indication de leur praticien, soit pour un usage personnel après lecture de notre livret d’initiation qui présente divers usages pour des maux de la vie courante. Nous sommes aussi présents dans des hôpitaux et auprès de nombreux personnels infirmiers.
Ainsi, pour développer notre clientèle, nous intervenons ponctuellement lors de séminaires de formation dans les écoles de MTC, et nous participons occasionnellement au salon de la fédération des écoles de MTC ; mais le principal vecteur de croissance reste toutefois le bouche à oreille.
Depuis votre reprise en 2007, qu’est devenue l’entreprise VERT NATURE ?
Partie d’une production unitaire sur rouleuse de cigarettes manuelle il y a 38 ans, la demande n’a fait que croître depuis par le bouche à oreille pour arriver à une réputation jamais démentie sur tout le territoire Français et désormais au-delà de nos frontières.
Aujourd’hui, il s’agit d’une TPE autonome avec plus de 38 ans de fonctionnement, qui commercialise en e-commerce des produits confectionnés à base d’une unique plante récoltée en pleine nature ne nécessitant ni culture, ni qualifications particulières, dont la récolte annuelle dépasse 3 tonnes.
L’avenir est assuré pour peu que la qualité des produits soit préservée dans le respect de la tradition, qui garantit la confiance et la fidélité des utilisateurs.
Quelles évolutions avez vous observé dans votre métier ?
Notre réputation de producteurs Français de moxas de qualité supérieure assure une croissance continue, mais maîtrisée pour préserver notre capacité à proposer des produits qualitatifs et notre mode de production artisanal.
Cette réputation a essaimé sur nos pays limitrophes tels que Belgique, Suisse, Allemagne, Italie, Espagne, mais aussi jusqu’à outre-atlantique (Canada). Nous avons toutefois choisi de restreindre notre périmètre de distribution à l’Europe où il existe cependant un réel potentiel de développement par les écoles de MTC de plus en plus nombreuses.
Bien que la concurrence Asiatique soit présente depuis toujours, la pression sur les prix est quasi inexistante. Cependant nous avons toujours opté pour une tarification raisonnable par respect pour nos clients.
Nos charges sont réduites au minimum, soit la location de notre local de production, l’achat des cartons d’emballages et des frais d’expéditions des colis, le comptable pour le bilan annuel, et bien sûr nos charges salariales. La matière première est généreusement fournie par dame nature.
Nous maintenons au moins 1 an d’avance de récolte (en boîtes) afin de se prémunir de risques climatiques exceptionnels, quoique peu probables vu la résilience exceptionnelle de cette plante. L’Armoise ne s’abîme pas dès lors qu’elle est stockée à l’abri de la lumière et de l’humidité. Certains puristes disent même qu’elle se bonifie avec le temps.
Quelles améliorations souhaiteriez-vous pour votre entreprise ?
Le mode de production artisanal est une valeur forte de notre activité qui contribue à notre bien-être autant qu’il renforce notre réputation et garantit la fidélité de nos clients.
La ressource en Armoise est assurée sur l’ensemble du territoire Français, car relativement résiliente au changement climatique,
Au-delà de la croissance naturelle et régulière du marché en France, certains marchés peuvent être largement développés à l’international déjà en Europe, et des nouveaux produits plus spécifiques peuvent être envisagés comme le coton d’armoise très pur utilisé dans les techniques japonaises en particulier.
L’activité actuelle peut tout à fait être envisagée en complément d’une autre activité indépendante, car elle n’excède pas un mi-temps en régime de croisière dans son volume actuel.
A transmettre
Nous allons à notre tour céder l’entreprise VERT NATURE pour cause de départ en retraite.
Nous (et nos clients) sommes très attachés à la pérennité de cette entreprise que nous gérons actuellement à deux, à mi-temps, avec des compétences complémentaires en commerce, gestion, informatique, mécanique, menuiserie, agriculture.
Nous mettrons donc évidemment en œuvre l’accompagnement nécessaire pour réussir la transmission et accompagner les nouveaux acquéreurs dans leur installation et leur prise en main des processus particuliers durant les premiers temps.
Les activités de l’entreprise concernent :
– les tâches de production : ramassage annuel, séchage, effeuillage, mise en rouleaux (principalement), mise en boîtes ;
– la commercialisation et l’expédition des commandes (en e-commerce essentiellement) ;
– la gestion et les saisies comptables.
Nous invitons toute personne intéressée par ce projet exaltant à consulter notre site Internet (www.vertnature.fr, transmission), pour soumettre un dossier de candidature.
